Depuis la capitale congolaise, la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) a lâché un pavé dans la mare. Dans un communiqué au vitriol, signé par Mgr Donatien Nshole et frappé du sceau d’une institution qui ne plie pas face au chaos, les évêques ont braqué les projecteurs sur une tragédie qui déchire la République Démocratique du Congo (RDC) : la traque sanglante des Swahilophones. Ce n’est pas un simple bout de papier orné d’une carte stylisée et d’une croix ;

c’est un cri, un uppercut à une société qui vacille au bord du gouffre.
L’EST EN FEU, UNE CHASSE SANS MERCI
Dans les ruelles poussiéreuses des KInsahsa, le tableau est sinistre. Les Swahilophones, ces Congolais dont la langue résonne des accents de l’Afrique de l’Est, sont dans le viseur. Accusés d’être des infiltrés, des traîtres ou des complices des milices qui pullulent dans la région, ils tombent sous les coups d’une violence aveugle. Les évêques catholiques n’y vont pas par quatre chemins : c’est une campagne de haine qui rappelle les heures les plus noires des Grands Lacs.
DES MOTS QUI TUENT
MAIS D’OU VIENT CE POISON ?
Les prélats pointent un doigt accusateur vers certaines tribunes politiques. Les discours de haine, relayés sur les réseaux sociaux, diabolisent les Swahilophones comme une cinquième colonne. « Une prédication pour la discrimination », tonne le communiqué, et l’écho est glaçant : on dirait les prémices des massacres qui ont ravagé le Rwanda ou le Burundi. Dans une situation explosive d’avancée des rebelles du M23/AFC, ce jeu avec le feu pourrait transformer la RDC en brasier. Les évêques sonnent l’alarme : si cette ségrégation s’enracine, les conflits intercommunautaires risquent de devenir une bombe à retardement.
UNE NATION HANTEE PAR SON PASSE
Pour la CENCO, cette folie n’est pas née de nulle part. Elle porte les stigmates d’un passé colonial qui a gravé des lignes de fracture dans l’âme congolaise. Les Swahilophones, souvent vus comme des « autres » à cause de leurs liens culturels avec les pays voisins, sont des proies faciles dans un climat de paranoïa.
« Nous invitons à la maturité », implorent les évêques, un appel à recoller les morceaux d’une identité nationale qui semble partir en lambeaux. Car au-delà des attaques aux « facies » , c’est l’unité même de la RDC qui est en jeu.
UN SURSAUT OU LA CHUTE
Face à cette descente aux enfers, la CENCO ne se contente pas de pleurs.
Elle cogne là où ça fait mal, sommant le gouvernement d’agir : protéger les victimes, museler les pyromanes de la haine, punir les coupables.
Les autorités congolaises, souvent sourdes aux cris de l’Est, dans le passé, sont mises au pied du mur. Mais les évêques parlent aussi au cœur des Congolais : ouvrez vos portes, tendez la main, refusez la division. C’est un appel à l’humanité dans un pays où elle semble s’effilocher.
UNE LUEUR DANS LA TEMPETE
Sous la plume de Mgr Nshole, le texte s’achève sur une note grave, presque sacrée. Une prière à Notre Dame du Congo, un souffle d’espoir pour une paix qui semble hors de portée. Mais ce communiqué n’est pas qu’une lamentation : c’est une torche dans la nuit, un défi lancé à une nation pour qu’elle se regarde en face.
Alors que les Swahilophones se sentent stigmatisés, surtout dans les provinces e l’Ouest de la RDCongo et que la RDC titube sous le poids de ses blessures, la CENCO pose une question brutale : UNITE OU ABIME ?
Dans un pays où l’actualité charrie trop souvent son lot de sang et de massacres, ce texte est un acte de foi – et un coup de poing pour que la raison l’emporte, enfin, sur la barbarie.
Il sied de rappeler que la CENCO, en collaboration avec l’Église du Christ au Congo (ECC), s’engage activement dans une médiation entre tous les belligérants pour promouvoir la paix, la réconciliation et mettre fin au conflit qui déchire l’Est de la République Démocratique du Congo.
Résistant Congolais
