
Dans un contexte de conflit meurtrier dans l’est de la République démocratique du Congo, deux communiqués distincts, publiés respectivement le 23 avril 2025 à Goma et à Kinshasa, annoncent la volonté d’un cessez-le-feu immédiat entre le Gouvernement congolais et l’Alliance Fleuve Congo/Mouvement du 23 Mars (AFC/M23). Ces déclarations, bien que marquées par des intentions de paix, soulèvent autant d’espoirs que de questions.
Signés séparément — l’un à Doha par l’AFC/M23, l’autre à Kinshasa par la RDC —, ces documents révèlent un engagement commun, mais leur manque de détails précis laisse planer un doute sur leur impact réel.
UN ENGAGEMENT AU CESSEZ-LE-FEU DANS UN CLIMAT TENDU
Le conflit, qui a repris de plus belle début 2025, a plongé l’est de la RDC dans le chaos. Selon des rapports, l’AFC/M23, accusé d’être soutenu par le Rwanda, a capturé des villes stratégiques comme Goma et Bukavu en février, causant des centaines de morts et déplaçant des milliers de personnes. Après plusieurs tentatives infructueuses de cessez-le-feu — plus de six depuis 2021, selon des sources internationales —, cette nouvelle trêve intervient après des pourparlers facilités par le Qatar et d’autres partenaires internationaux, qui, selon certains sources, étaient à un point mort.
Le premier communiqué, daté du 23 avril et signé à Goma par le AFC/M23, annonce un « cessez-le-feu immédiat et efficace » entre les deux parties, avec un rejet clair des discours de haine et un appel aux communautés locales pour soutenir cet effort.
Le 23 avril, un second communiqué signé à Kinshasa par la délégation congolaise renforce cet engagement, ajoutant des mesures comme le retour des populations déplacées et des efforts pour restaurer la confiance mutuelle.
DES ENGAGEMENTS FLOUS
Sur le papier, les deux camps s’accordent sur des points essentiels : un arrêt immédiat des hostilités, un dialogue pour résoudre les causes profondes du conflit, et un appel à la société civile pour soutenir le processus. Le communiqué de Kinshasa va plus loin, évoquant des conditions pour le retour des déplacés, un enjeu crucial dans une région où des centaines de milliers de personnes ont fui les violences.
Mais derrière ces déclarations, le flou domine. Aucun mécanisme de surveillance n’est mentionné, pas plus qu’un calendrier précis ou des sanctions en cas de violation. Ce manque de spécificité est préoccupant dans une région où les cessez-le-feu précédents se sont souvent effondrés faute de suivi. Comme le souligne The Guardian (24 avril 2025), des discussions sur des mesures de confiance, telles que la libération de prisonniers, ont déjà créé des tensions, laissant craindre une reprise rapide des combats.
À QUOI S’ATTENDRE DE CET ENGAGEMENT ?
Concrètement, ce cessez-le-feu pourrait offrir un répit temporaire aux populations civiles, permettant aux organisations humanitaires d’accéder à des zones jusque-là inaccessibles. Le retour des déplacés, mentionné dans le second communiqué, pourrait également amorcer une stabilisation, mais uniquement si des garanties de sécurité sont mises en place — ce qui n’est pas encore clair.
Cependant, sans mécanismes de contrôle ni médiation active sur le terrain, cet engagement risque de rester symbolique.
Les signatures séparées, l’une par l’AFC/M23 à Doha, l’autre par la RDC à Kinshasa, trahissent un manque de coordination formelle, pouvant compliquer la reconnaissance internationale de l’accord. De plus, les causes profondes du conflit ne sont pas abordées de manière concrète.
UNE LUEUR D’ESPOIR, MAIS DES DEFIS MAJEURS
Si ce cessez-le-feu marque un pas diplomatique, il reste fragile.
Les habitants de l’est de la RDC, habitués aux promesses non tenues, attendent des actions tangibles : des corridors humanitaires sécurisés, un désarmement vérifiable, et un dialogue inclusif. Sans cela, cette trêve pourrait n’être qu’une pause dans un cycle de violence qui perdure depuis des années, pour ne pas sanctionner la mort du processus de Doha, après la circulation, ces derniers jours, d’information faisant état de profondes divergences irrésolues entre les deux délégations. Bref, une promesse de deux côtés de cessez-le-feu à venir est différente d’un vrai cessez-le-feu sanctionné par un communiqué conjoint et circonstancié dans l’ espace et le temps.
On a certes sauvé la face à l’ Emir du Qatar, engagé dans cette négociation depuis des mois, mais la paix et la cessation effective des hostilités nous semble encore très lointaine et diplomatiquement indéterminée, comme dans un poker menteur joué par les deux parties en conflit.
Résistant Congolais
—————————————–