MAHAGI, FEVRIER 2025 : L’OMBRE OUGANDAISE S’ETEND SUR LE CONGO ALORS QUE LE GENERAL MUHOOZI KAINERUGABA METTE EN EXECUTION SES PROVOCATIONS

Sous un ciel lourd de tensions, les bottes ougandaises ont foulé le sol de Mahagi, dans l’Ituri congolais, ce vendredi 28 février 2025. Sans crier gare, sans un mot aux autorités locales, les troupes de l’Uganda People’s Defence Force (UPDF) se sont installées, ouvrant elles-mêmes la barrière de la frontière entre RDC et l’Ouganda, dans une terre déjà martyrisée par des décennies de guerre. À des centaines de kilomètres du tumulte du M23/AFC dans le Nord-Kivu, cette incursion soulève une question lancinante :

que veut l’Uganda dans ce coin perdu de la frontière ? Et pourquoi maintenant ? La réponse, comme souvent dans les Grands Lacs, se lit dans un mélange toxique d’ambition, de ressources et de rivalités historiques.

LE GRONDEMENT DE MUHOOZI

À Kampala, une voix résonne, stridente et belliqueuse : celle du Général Muhoozi Kainerugaba, fils du président éternel Yoweri Museveni et chef des forces terrestres ougandaises.

Ce général au verbe haut, héritier présumé d’un régime qui ne connaît pas de crépuscule, ne cache pas ses intentions. Dans des déclarations qui claquent comme des coups de feu, il revendique une « zone d’influence » pour l’Ouganda dans l’est de la RDCongo, un écho audacieux aux sphères de contrôle que Kigali impose via le M23/AFC. « Si le Rwanda a ses pions, pourquoi pas nous ? » semble-t-il dire, défiant à la fois Kinshasa et son voisin rwandais.

Muhoozi n’est pas un novice dans l’art de la provocation. En 2022, il avait menacé d’envahir Nairobi en un tweet rageur, avant de battre en retraite sous les rires et les critiques.

Aujourd’hui, ses mots portent un poids différent : ils s’accompagnent d’une démonstration concrète à Mahagi, comme il avait déjà fait il a deux semaines à Bunia.

Est-ce le cri d’un homme qui prépare son destin présidentiel, drapé dans le prestige d’une stature militaire ? Ou une tentative de l’Uganda de reprendre pied dans un jeu régional où le Rwanda semble dicter les règles ? Une chose est sûre : derrière ses fanfaronnades, il y a un calcul froid.

Une frontière qui n’en est plus une

Mahagi n’est pas un hasard. À deux pas de la frontière ougandaise, cette bourgade oubliée des cartes stratégiques internationales est un carrefour discret mais vital. L’or de l’Ituri, le pétrole du lac Albert, le bois précieux – autant de trésors qui circulent dans l’ombre, souvent vers Kampala, via des réseaux que l’ONU a dénoncés dès les années 2000. L’Ouganda n’a jamais vraiment quitté l’est du Congo depuis les grandes guerres de 1996-2003, quand ses soldats et ceux du Rwanda s’étaient entre-déchirés à Kisangani pour une poignée de diamants et de pouvoir.

Aujourd’hui, l’alibi officiel reste la sécurité. Les Allied Democratic Forces (ADF), cette milice islamiste née en Ouganda et retranchée dans les jungles de Beni, servent de prétexte commode. Et d ‘ailleurs, depuis septembre 2024, 1000 congolais ont été massacrés par les ADF en Ituri et Nord Kivu (selon Radio Okapi, 01/03/2025), laissant perplexes tous ceux qui se posent des questions sur l’ efficacités des « opérations conjointes » entre les forces armées congolaises, FARDC, et les forces armées ougandaises, UPDF, l’alibi de la présence des ougandais sur le territoire de la RDCongo.

Mais Mahagi n’est pas leur terrain de jeu. Alors pourquoi ? Peut-être parce que le vide laissé par Kinshasa, incapable de tenir ses propres terres, est une invitation trop tentante. Peut-être parce que le M23/AFC, poussé par le Rwanda, redessine la carte de l’est, et que l’Ouganda refuse de rester sur le banc de touche.

Mahagi devient ainsi une borne, un message : « Ceci est notre sphère. »

Le spectre d’une guerre sans fin

Pour les Congolais de l’Ituri, déjà épuisés par les massacres Hema-Lendu et les raids des milices, l’arrivée des Ougandais n’annonce rien de bon. Les FARDC, cette armée congolaise moribonde, n’ont ni les moyens ni la volonté de s’opposer. Kinshasa condamnera, gesticulera, mais sans appui massif – de la SADC, de l’Angola ou d’un improbable sursaut international – la RDC risque de plier, encore. Les habitants de Mahagi, eux, savent ce qui les attend : des villages vidés par la peur, des routes coupées, une vie suspendue au bon vouloir d’une puissance étrangère.

Et si l’Ouganda pousse plus loin ? Si Muhoozi, grisé par ses propres discours, rêve de Lubero, Beni et Bunia – déjà occupée par les UPDF- ou d’ailleurs ? Le scénario n’est pas farfelu. L’histoire des Grands Lacs est une litanie de promesses brisées et de conflits par procuration. L’Uganda et le Rwanda, anciens alliés devenus rivaux, ont déjà transformé l’est du Congo en champ de bataille pour leurs ambitions. Mahagi pourrait n’être que l’énième acte d’un drame plus vaste, où les deux voisins se disputent les dépouilles d’un géant affaibli.

UN ECHIQUIER EN FEU

Le Congo brûle à l’est, et chaque joueur avance ses pièces. Le Rwanda, avec le M23/AFC, s’offre des pans entiers du Kivu. L’Uganda, sous le masque de la lutte contre les ADF, pose ses jalons en Ituri. Kinshasa, impuissant, regarde ses frontières s’effacer. Et au milieu, des millions de Congolais paient le prix d’un jeu qu’ils ne contrôlent pas.

Muhoozi Kainerugaba, avec ses mots de feu et ses soldats à Mahagi et à Bunia et ailleurs, incarne une Ouganda qui refuse de jouer les seconds rôles.

Mais dans cette région où chaque provocation peut allumer un brasier, son pari est risqué. Pour les Congolais, l’heure est à la méfiance :

face à un voisin qui parle d’influence et agit en conquérant, la paix n’est qu’un mirage.

La guerre, elle, rôde toujours, prête à reprendre ses droits sur une terre qui n’a jamais connu le repos.

Résistant Congolais


MAHAGI, FEBRUARY 2025: UGANDA’S SHADOW SPREADS OVER CONGO AS GENERAL MUHOOZI KAINERUGABA PUTS HIS PROVOCATIONS INTO ACTION MAHAGI, FEBRUARY 2025: UGANDA’S SHADOW EXTENDS OVER DR CONGO

Congolese Resistor@VERITAS010101

Under a sky heavy with tension, Ugandan boots trampled the soil of Mahagi, in Congo’s Ituri region, on Friday, February 28, 2025. Without warning, without a word to local authorities, troops from the Uganda People’s Defence Force (UPDF) settled in, opening the border barrier between the Democratic Republic of Congo (DRC) and Uganda themselves, on land already scarred by decades of war. Hundreds of kilometers from the chaos of the M23/AFC in North Kivu, this incursion raises a persistent question: what does Uganda want in this forgotten corner of the border? And why now? The answer, as so often in the Great Lakes region, lies in a toxic mix of ambition, resources, and historical rivalries. THE ROAR OF MUHOOZI In Kampala, a sharp and belligerent voice echoes: that of General Muhoozi Kainerugaba, son of Uganda’s eternal president Yoweri Museveni and commander of the Ugandan land forces. This outspoken general, presumed heir to a regime that knows no sunset, makes no effort to hide his intentions. In statements that crack like gunfire, he claims a « zone of influence » for Uganda in eastern DR Congo—an audacious echo of the spheres of control Rwanda imposes through the M23/AFC. « If Rwanda has its pawns, why not us? » he seems to say, challenging both Kinshasa and his Rwandan neighbor. Muhoozi is no stranger to the art of provocation. In 2022, he threatened to invade Nairobi in an angry tweet, only to backtrack amid laughter and criticism. Today, his words carry a different weight: they are backed by a tangible demonstration in Mahagi, as they were two weeks ago in Bunia. Is this the cry of a man preparing his presidential destiny, cloaked in the prestige of military stature? Or an attempt by Uganda to regain footing in a regional game where Rwanda seems to set the rules? One thing is certain: behind his bluster lies a cold calculation. A BORDER THAT NO LONGER EXISTS Mahagi is no random choice. Just steps from the Ugandan border, this overlooked town—absent from international strategic maps—is a discreet yet vital crossroads. The gold of Ituri, the oil of Lake Albert, precious timber—so many treasures flow in the shadows, often toward Kampala, through networks the UN has condemned since the early 2000s. Uganda has never truly left eastern Congo since the great wars of 1996-2003, when its soldiers and Rwanda’s clashed in Kisangani over a handful of diamonds and power. Today, the official excuse remains security. The Allied Democratic Forces (ADF), an Islamist militia born in Uganda and now entrenched in the jungles of Beni, provide a convenient pretext. Indeed, since September 2024, 1,000 Congolese have been massacred by the ADF in Ituri and North Kivu (according to Radio Okapi, 03/01/2025), leaving many baffled by the effectiveness of the « joint operations » between the Congolese armed forces (FARDC) and the UPDF—the alibi for Uganda’s presence on DRC soil. But Mahagi is not their playground. So why? Perhaps because the vacuum left by Kinshasa, unable to control its own land, is too tempting an invitation. Perhaps because the M23/AFC, backed by Rwanda, is redrawing the map of the east, and Uganda refuses to sit on the sidelines. Mahagi thus becomes a marker, a message: « This is our sphere. » THE GHOST OF ENDLESS WAR For the people of Ituri, already exhausted by the Hema-Lendu massacres and militia raids, the arrival of Ugandans bodes ill. The FARDC, Congo’s ailing army, lacks both the means and the will to resist. Kinshasa will condemn and protest, but without massive support—from the SADC, Angola, or an unlikely international surge—the DRC risks buckling once more. The residents of Mahagi know what awaits: villages emptied by fear, roads cut off, lives held at the mercy of a foreign power. And what if Uganda pushes further? What if Muhoozi, emboldened by his own rhetoric, dreams of Lubero, Beni, or Bunia—already occupied by the UPDF—or beyond? The scenario is not far-fetched. The history of the Great Lakes is a litany of broken promises and proxy conflicts. Uganda and Rwanda, once allies turned rivals, have already turned eastern Congo into a battlefield for their ambitions. Mahagi could be just the latest act in a broader tragedy, where the two neighbors vie for the spoils of a weakened giant. A CHESSBOARD ABLAZE The Congo burns in the east, and each player moves their pieces. Rwanda, with the M23/AFC, carves out swathes of the Kivus. Uganda, under the guise of fighting the ADF, stakes its claim in Ituri. Kinshasa, powerless, watches its borders fade. And in the middle, millions of Congolese pay the price for a game they cannot control. Muhoozi Kainerugaba, with his fiery words and soldiers in Mahagi, Bunia, and beyond, embodies a Uganda that refuses to play second fiddle. But in a region where every provocation risks igniting a firestorm, his gamble is a dangerous one. For the Congolese, the time is one of distrust: faced with a neighbor that speaks of influence and acts like a conqueror, peace is but a mirage. War, meanwhile, lurks ever near, ready to reclaim its hold over a land that has never known rest.

Congolese Resistor


MISE A JOUR DU 05/03/2025

Après #Bunia et #Mahagi, déploiement massif de l’armée ougandaise à #Butembo cette nuit 05/03/2025. Vers un retour au partage de l’EST de la RDC entre Rwanda et Ouganda coe en 1999-2003. Un Gvt d’union nationale est promis sur la partie restante du territoire. C’était ça le deal ?

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